un poème de la rue des pommiers
tu improvises au ventre mol de l’été versatile un vêtement électrique colle à ta peau nonobstant tu dirais snob ostentatoire la vie te flagelle bien les bas flancs histoire de donner à ton visage ce creux délicieux histoire de mouiller tes yeux de chien avant l’excuse finale rien ne progresse, ce petit peuple renâcle à se révolter dans l’écurie le vieux cheval piaffe d’impatience le front est froid tout se fatigue autrefois, quand j’avais douze ans, à peine nubile encor je savais d’un geste léger faire voler des cerfs volants sur l’herbe du jardin aujourd’hui les saccades du vent m’immolent dans le ridicule des pierres j’ai vieilli c’est cela, et vieillir rend immodeste et inconscient du vertige qu’il y a toujours plus délicieux à se pencher sur le précipice notoire de la vie nonobstant nous rions nous ne nous claquemurons pas nous saluons bas les politiciens et faisons quelque risette aux enfants avant de saigner dans le bas fond du lit dans le ventre noir et ensanglanté du lit où sèche le placenta de notre enfance celle là que nous avons trahie avec constance nonobstant sommes devenus adultes au bord du vide nous sommes restés debout devant le cadavre de nos parents nous n’avons pas vomi nous avons fait bonne figure et puis, au seuil de notre vie, nous avons mimé la joie comme on creuse un rictus imbécile
Ce poème a été publié dans la série « Rue des pommiers ». Cette série de textes a été elle même écrite de 2011 à 2015 alors que je séjournais dans les Hautes-Alpes. On trouvera quelques allusions aux grands espaces, à la vie animale, à la montagne ou au climat de la région et notamment de la vallée du Buëch ou du Dévoluy. Mais en réalité, il n’y a pas de lien direct entre le lieu de vie et l’écriture. Il s’agit plutôt d’échos à la vie, son quotidien. Si certains reconnaîtront des clés ou des allusions, il serait vain de vouloir tenter une quelconque biographie à l’aide de ces fragments… Ce qui compte c’est l’image, la métaphore… Certains de ces textes ont pu donner lieu à une mise en musique et ont ensuite été donnés comme « chansons ».
